Par Guillaume DAUDIN, PARIS, 18 fév 2011 (AFP)
Les militants de Jeudi Noir ont été expulsés vendredi de l’immeuble de bureaux proche de l’Elysée qu’ils squattaient près de deux mois mais se sont dits déterminés à mener de nouvelles occupations de bâtiments vides pour lutter contre le mal-logement.
Le tribunal d’instance du VIIIe arrondissement de Paris avait ordonné mardi l'”expulsion immédiate et sans délai” de cette propriété de l’assureur d’Axa, avenue Matignon, décision mise en œuvre sans violence mardi matin.
“La décision de justice a été appliquée, mais cela ne remet pas en cause notre volonté de dialoguer de manière constructive avec les militants de Jeudi Noir pour leur trouver des solutions de relogement”, a commenté un porte-parole du groupe Axa joint par l’AFP.
“Ce qui s’est passé ce matin me renforce encore dans mon combat, qui me paraît encore plus juste et légitime”, a affirmé Maxim Hupel, membre du collectif, joint par l’AFP après l’opération. “Quand je vois la pression médiatique qui a entouré cette affaire et à quel point on a réussi à faire parler du mal-logement, je me dis que ce qui s’est passé est une victoire”, a-t-il ajouté.
Depuis fin décembre 2010, ils étaient une trentaine de travailleurs précaires, d’étudiants et de militants de Jeudi Noir à dormir dans ce bâtiment. Venus en nombre, les policiers ont pénétré dans le bâtiment de huit étages vers 7H20 en forçant, à coups de bélier, la porte d’entrée qui avait été barricadée par les occupants, la plupart regroupés dans le hall. Les squatteurs, qui avaient prévenu qu’ils ne se laisseraient pas faire, n’ont opposé qu’une résistance symbolique à leur expulsion, certains s’enchaînant aux herses de l’entrée, d’autres se retranchant brièvement sur le toit. Un membre du collectif a fait un malaise vagal, un autre a été légèrement touché à un doigt, ont précisé des militants. Vers 8H30, à peine plus d’une heure après le début de l’opération, la totalité du bâtiment avait été vidée de ses occupants. Dix-huit squatteurs ont été évacués dans un bus de police, conduits au commissariat avant d’être immédiatement relâchés vers 9H30, ont-ils ajouté.
“On est fatigués mais ça va, a déclaré, après avoir été relâchée, Elise Aubry, membre du collectif, à l’AFP. C’est assez symbolique de se faire expulser le jour du G20 : c’est comme une honte au gouvernement qui s’attaque aux mal-logés plutôt qu’au mal-logement”. “On est aussi un peu dégoûtés de la manière dont ça a été fait, a-t-elle ajouté, avec autant de forces de police pour déloger des personnes sans logement, tandis qu’hier Axa annonçait 2,7 milliards de bénéfice net”.
Vers 18hh0, une cinquantaine de militants et de sympathisants ont organisé une “dépendaison de crémaillère” en face de l’immeuble en débouchant quelques bouteilles. José, un militant de Jeudi Noir a dit à l’AFP que l’apéritif visait “à marquer le coup” pour les absents de la matinée et pour montrer qu’on continue, cela fait quatre ans que cela dure, ils nous virent et l’on revient”.
“Les virer de la sorte, c’est un message catastrophique adressé à notre jeunesse”, a regretté Sylvain de Smet, conseiller régional Europe Ecologie-Les Verts, qui a dormi plusieurs nuits dans le bâtiment avec Jeudi Noir et qui a passé la dernière nuit à l’extérieur, sur un matelas, car la police refusait de le laisser entrer. “Ces gamins revendiquent un droit universel, celui de se loger dans de bonnes conditions”, a t-il affirmé.
En octobre 2010, Jeudi noir avait déjà été évacué d’un squat qu’ils occupaient depuis plusieurs semaines place des Vosges, à Paris.