L’annonce a été faite discrètement fin septembre. Depuis, elle ne s’est pas ébruitée. Et pour cause : elle pourrait avoir l’effet d’une bombe. Alors que depuis des années la mairie de Paris négocie avec le ministère des Transports pour réduire le trafic de l’héliport d’Issy-les-Moulineaux qui empoisonne la vie des riverains, la ville a appris que deux autres lieux de dépose en hélicoptère pourraient voir le jour à Paris.
Une au nord, dans le quartier de la porte d’Aubervilliers (XVIIIe-XIXe) et l’autre à l’est, du côté de Bercy (XIIe).
En fait, d’après la carte que nous nous sommes procurée, l’Etat étudie actuellement différents sites d’implantation sur Paris et la banlieue. En plus des portes parisiennes, il est ainsi envisagé d’implanter un héliport du côté de La Défense et un autre dans la boucle Seine-Nord, du côté de Gennevilliers – Villeneuve-la-Garenne.
Trop près du futur ministère de la Défense
Le projet émane du secrétaire d’Etat aux Transports, Dominique Bussereau. Objectif recherché : pallier la prochaine baisse du trafic de l’héliport d’Issy-les-Moulineaux. D’ici à 2014, le nombre de vols sur ce site devrait passer de 12000 à 3000 par an. Seules les missions de « service public » et d’urgence y seront maintenues. « Le futur siège du ministère de la Défense, le Pentagone à la française, va être implanté tout près. C’est pour cette raison que l’Etat a finalement accepté de réduire le trafic de l’héliport d’Issy-les-Moulineaux comme nous le demandions depuis des années. Mais, si c’est pour ouvrir d’autres infrastructures ailleurs, c’est se moquer du monde! » s’agace Michel Riotto, président de l’association Ile-de-France Environnement.
Le secrétaire d’Etat aux Transports, lui, juge au contraire nécessaire d’améliorer la desserte de Paris. Après la réunion du 30 septembre, l’Etat veut aller vite. Très vite. « Chaque site potentiel fera l’objet d’une concertation avec les collectivités et riverains concernés d’ici la fin 2010 », annonce un document de travail. « Tout ça est en cours de discussion », tempère-t-on à la préfecture. « Une concertation ? Quelle concertation ? Nous, personne n’est venu nous voir », s’étonne Denis Baupin, l’adjoint au maire de Paris chargé du développement durable. « Tout ça manque de transparence. En plus, c’est en totale contradiction avec le plan de lutte contre le bruit que nous sommes en train d’élaborer. De toute façon, si nous luttons depuis des années pour limiter les nuisances de l’héliport d’Issy-les-Moulineaux, ce n’est pas pour en voir deux autres ouvrir ailleurs », annonce l’élu parisien.
Les réactions : entre soulagement et inquiétude
Dans le sud du département, c’est le soulagement. « C’était l’enfer, surtout le week-end. Les nuisances étaient plus réduites par mauvais temps. Cette décision est évidemment une bonne nouvelle pour les habitants des communes voisines de l’héliport d’Issy-les-Moulineaux », analyse Alain Mathioudakis, président de l’association Val de Seine vert.
« On ne peut que se réjouir de la fin des vols commerciaux depuis Issy. Ce sera vraiment une bouffée d’air pour les riverains, ajoute Catherine Candelier, conseillère municipale Europe Ecologie à Sèvres. Après, si le trafic n’est que reporté sur le nord du département ce n’est pas non plus la solution : on ne fait que déplacer le problème. Pour les vols commerciaux, l’hélico n’est pas un moyen de transport écologique ni économique. »
Dans la boucle nord des Hauts-de-Seine en revanche, les élus n’ont pas entendu parler du projet. Mais ça ne devrait pas tarder… La préfecture a pris contact avec la municipalité de Gennevilliers pour aborder le sujet. Jacques Bourgoin, le maire (PC) de la commune, s’est pour l’instant refusé à tout commentaire : « J’attends d’avoir le dossier. Je n’ai aucune idée, en l’état, des avantages et des inconvénients d’un tel projet. »